Au “Positive Economy Forum” de Jacques Attali George Oxley alerte, évènement dont Sciences et Avenir est partenaire, nous publions ce texte du biologiste George Oxley où il explique que “le champignon est l’acteur incontournable de notre survie”.
Sciences et Avenir est partenaire média de la 5e édition du “Positive Economy Forum”, que préside Jacques Attali. A l’occasion de cet événement, nous vous proposons de découvrir les actrices et acteurs de différentes initiatives pour le respect et la protection de l’environnement. Tous interviendront au Havre, entre le 13 et le 17 septembre 2016. “Depuis 5 ans, le Positive Economy Forum rassemble de plus en plus d’acteurs agissant pour que les générations futures vivent dans un monde meilleur, explique Jacques Attali. Après la COP 21 et dans un monde plein de craintes et de désespérances, cette 5e édition du Forum, toujours au Havre, du 13 au 17 septembre, va transformer les débats en action. C’est ce que nous ferons pendant ces 5 jours et nous en tirerons un programme d’actions concrètes que nous proposerons aux principaux responsables mondiaux et nationaux aux lendemains du Forum”. La première tribune que nous reproduisons sur le site de Sciences et Avenir est celle du biologiste spécialiste de la vie des sols, George Oxley. Ce spécialiste du micro-monde a étudié la végétation sauvage, notamment au Pérou ou au Congo, et l’usage que l’on peut en faire pour améliorer le climat et la santé. George Oxley étudie les techniques naturelles de dépollution des sols. Il s’est aussi engagé dans la lutte contre les maladies orphelines. Egalement auteur, George Oxley a écrit “Manifeste Gourmand des Herbes Folles” (2013, Toucan) ou encore “La Fleur Au Fusil” (2015, Gallimard). Voici son texte :
Le sol est le tube digestif de la terre. Tout ce qui tombe dessus y est digéré pour nourrir la vie. Nous nourrir. 90% des êtres sur terre y vivent. Le ver de terre est en haut de cette pyramide, un superprédateur, sans le reste il n’est rien.
Le bio, cela semble excellent. Pas d’engrais de synthèse, ces sels qui perturbent cette vie, aucun pesticide qui englue de matières fossiles visqueuses la chaîne alimentaire au plus profond. Mais le bio sans bonne pratique agricole, sans connaissance du vivant, est tout aussi toxique. En surface, il y a des êtres qui vivent avec l’air, au fond sans air, puis les intermédiaires qui peuvent s’en passer. Vous labourez : ceux du dessus meurent étouffés, ceux du fond crèvent au soleil. Restent les intermédiaires, Escherichia coli, Bacille doré, Clostridia, les maladies nosocomiales des hôpitaux… et énormément de protéines se décomposent en méthane et protoxyde d’azote, gaz 20 et 300 fois plus à effet de serre que le CO2, qui s’accumule 20 à 120 fois plus…
Notre système digestif s’inspire du sol. Le petit d’homme quasiment vierge de bactérie est ensemencé par l’utérus, puis par la nourriture de son sol : nous sommes des bouts de sol à pattes avec 10 fois plus de bactéries, 100 fois plus de virus et 10 fois plus de champignons que de cellules humaines.
1ère idée : Le labour nous met en contact direct avec les bactéries pathogènes
Une bactérie est mauvaise quand elle n’est pas à sa place : en haut, de la bouche à l’estomac, il y a les bactéries de l’air, puis les intermédiaires, enfin les bactéries anaérobiques dans le gros colon. Mettre tout cela sans dessus dessous, labourer ? Lorsque les bactéries qui vivent avec l’air sont détruites, les bactéries intermédiaires pathogènes les remplacent, dans notre nourriture, comme dans notre corps.
2e idée : La nourriture issue d’un sol violenté produit la violence de nos enfants
Une étape de digestion saute et les aliments se digèrent plus difficilement par la suivante, des aliments plus gros passent les parois intestinales : de la douleur, du stress pour l’adulte, de la violence pour l’enfant. Avec le système immunitaire affecté par les bactéries intermédiaires pathogènes, arrive la fatigue, les allergies chroniques, par des défenses en éveil au moindre événement, voire des infections récurrentes.
3° idée : la nourriture d’un sol mort provoque la dégénérescence nerveuse :
L’eau ne rentre pas dans le sol de manière mécanique : les bactéries et les champignons échangent l’eau. S’il n’y en a plus, l’eau chasse l’air, l’argile se compacte comme du béton, il colle. L’argile est un silicate d’aluminium : 1m3 de sol c’est 70kg d’aluminium et de fer. Plus d’oxygène et l’aluminium de Al2+ devient Al3+, le fer devient ferrique, le nitrate, nitrite. Dans la nourriture, les ions de métaux lourds pourraient perturber les échanges électriques neuronaux et devenir sources de maladies neurodégénératives… Ils se déplacent avec les acides gras des plantes et se concentrent dans le gras, la moelle ou le cerveau par exemple.
4° idée : la nourriture industrielle est source de carence en acides aminés essentiels.
Sur nos 22 acides aminés, 9 sont essentiels. Nous ne pouvons les fabriquer. Ce sont les mycorhizes symbiontes des racines des plantes, qui construisent ces briques de la vie essentielles à l’homme. Le labour détruit ces liaisons. Nous compensons nos carences par la viande de l’animal ou du poisson, qui a mangé des plantes sauvages, mais le végétarien ?
5° idée : Les fleurs indiquent les qualités du sol, sa fertilité :
la plante a inventé la graine pour attendre le bon moment pour pousser. Une fois les conditions de levée de dormance d’une graine connue, la fleur nous révèle les qualités précises du sol.
6° idée : la symbiose, la commensalité est la base de la vie – le champignon est son artisan central :
Le 4 août 2015, treize universités, 22 chercheurs de 7 pays, démontrent que l’ancêtre des plantes est une algue qui s’allie à une mycorhize. La définition d’une plante est désormais : un végétal associé à un champignon. Après la plante, les briques essentielles à l’homme… Dieu est-il un champignon ? Voici des raisons pour être vigilant sur la biodiversité et la vie des sols dont les champignons sont les acteurs incontournables de notre survie : Vive le spore !